mardi 14 octobre 2014

Nous sommes Sankara

” Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous les modèles que tous les charlatans de même acabit ont essayé de nous vendre 20 années durant. Il ne saurait y avoir pour nous de salut en dehors de ce refus là. Pas de développement en dehors de cette rupture là. Il faut ranimer la confiance du peuple en lui-même en lui rappelant qu’il a été grand hier et donc, peut-être aujourd’hui et demain. Fonder l’espoir ". Thomas Sankara

Quinze octobre 1987, qui se souvient qu’il a fait un peu plus froid même sous les tropiques ? Comme si une main glaciale avait étreint nos souffles. Qui remémore le fait que le monde a semblé s’arrêter ? Qui se rappelle le fait que beaucoup sont descendus du train de l’espoir croyant le message mort avec le messager ?

Le quinze octobre 1987, le héros est tombé. Nos vingt ans se sont pétrifiés comme se figeaient nos espoirs.

Etait-il possible que l’Afrique n’ait pas d’autre solution que l’acceptation servile de définitions d’elle-même et de sa destinée par d’autres ? Etait-il possible que la seule possibilité qui nous soit accessible soit celle d’accepter le mépris et l’offense faite à l’Afrique sans réagir ?

Etait-il possible que notre Thomas n’ait été qu’un combattant contre des moulins à vents le temps d’être arrêté ?

Etait-il possible que la funeste et tentaculaire Françafrique ait eu à toujours le dernier mot sur nos destinées d’Afrique ?

Il a soufflé sur nos cœurs un vent paralysant.

Isidore Noël Thomas SANKARA était devenu en quelques années le visage de nos rêves d’Afrique. Orateur exceptionnel il savait nous toucher dans ce que nous avions d’essentiel : notre africanité, notre dignité, notre humanité, notre appartenance pour une partie de la jeunesse à la gente féminine. Nous avions vingt ans et voici qu’un homme nous offrait par son regard, son action et ses mots des lendemains autres que le fait de marcher sur les sentiers largement battus de l’Afrique aux ordres.

Isidore Noël Thomas SANKARA, figure de la liberté, de la dignité, de l’audace, d’une jeunesse autrement. Les François Mitterrand et autres Félix Houphouet Boigny auraient voulu le réduire au rôle du jeune agité utopiste et incontrôlable. Ils auraient voulu que l’on ne voie en lui que cela. Mais voilà, Sankara était porté par un feu qui parlait aux braises de nos désirs de liberté et, en nous se levait un feu pour la terre mère, pour nos nations.

Il est une jeunesse en Afrique, jeunesse d’hier ou d’aujourd’hui qui n’a pas pour ambition de revêtir le costume de l’oncle Tom en singeant l’occident et ses valeurs. Cette jeunesse n’a pas pour fin l’entrée dans les schémas allogènes de la réussite au point de ne plus se soucier des intérêts du pays ou du continent. La force de la jeunesse c’est sa capacité à embrasser avec passion des idéaux élevés. Que communiquons-nous à notre jeunesse, laissons passer le souffle de Thomas.

Thomas Sankara a été une voix quasi prophétique pour réveiller nos esprits en somnolence pour les inviter à repenser l’Afrique autrement et avec espérance. «  La plus grande difficulté rencontrée est constituée par l’esprit de néo-colonisé qu’il y a dans ce pays. Nous avons été colonisés par un pays, la France, qui nous a donné certaines habitudes. Et pour nous, réussir dans la vie, avoir le bonheur, c’est essayer de vivre comme en France, comme le plus riche des Français. Si bien que les transformations que nous voulons opérer rencontrent des obstacles, des freins  » Thomas Sankara
Oh il ne caressait pas l’auditoire dans le sens du poil. Il lançait des défis par les mots. « Ces aides alimentaires (…) qui installent dans nos esprits (…) ces réflexes de mendiant, d’assisté, nous n’en voulons vraiment plus ! Il faut produire, produire plus parce qu’il est normal que celui qui vous donne à manger vous dicte également ses volontés. » 1ère conférence nationale des CDR, 4 avril 1986.

Les « aînés » africains et autres gouvernants français auraient aimé réduire sa passion et sa fougue en une exaltation de quelque illuminé, mais l’homme avait sur le monde plus qu’une œillade, il avait un regard, une vision.

Il a osé parler de et à l’occident avec fermeté : « Le pillage colonial a décimé nos forêts sans la moindre pensée réparatrice pour nos lendemains” 1983, Paris, Conférence Internationale sur l’arbre et la forêt.

Il s’est arrogé le droit de dénoncer et de s’attaquer aux fondations de la Françafrique. « Le système néocolonial tremble quand le peuple devenu maître de sa destinée veut rendre sa justice ! » (T. Sankara)

La pieuvre ne pouvait rester inerte elle avait un tentacule prénommé Blaise qui a opportunément oublié que Thomas et lui avaient été amis. Le tentacule osera nier cette amitié après le crime odieux. Thomas est tombé, Compaoré peut régner. Oui mais voilà après la tétanie, après la pétrification, après les colères et autres désespoirs, la voix et le souffle de Thomas éveillent encore et toujours nos esprits. Compaoré et ses comparses gouvernent (si l’on peut dire) des pays, mais ils ne règnent pas sur nos libertés de penser et d’envisager l’Afrique. Thomas et ceux qui l’on précédé ont frayé des chemins de liberté dans nos conscience. Ils ont tué un homme, ils ne l’ont pas vaincu pour autant.

Le message de Thomas Sankara était plus grand que les limites de sa peau, il continue à rappeler aux jeunes et moins jeunes qu’une Afrique autrement est possible. Les meurtriers coupables et ou complices de son assassinat n’ont pas tué le rêve ils en ont différé juste la réalisation. Un homme est mort mais il a semé des pousses d’espoir et par toute l’Afrique se lèvent et se lèveront des femmes et des hommes animés de cette sainte jalousie pour l’Afrique et qu’elle le veuille ou non la pieuvre lâchera prise et ira étendre ses ignobles tentacules ailleurs.

« Tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront ! » disait Thomas Sankara.
Nous sommes des Thomas Sankara en puissance. Pour la cause de l’Afrique panafricaine et libre nous devons laisser passer le souffle qu’il portait.
Respects profonds et reconnaissants à ta mémoire Isidore Noel Thomas SANKARA. Que le souffle qui animait tes combats se ranime avec force ce jour et pour la suite des temps afin que l’Afrique notre Afrique se lève comme un seul homme pour refuser désormais pour refuser toute cession sur les terrains de la liberté et de la dignité.
Aussi imparfait qu’il ait été, sa fougue et ses erreurs ne l’avaient pas changé dans sa passion pour une Afrique libre et digne. Il avait rêvé l’Afrique autrement, le nom de son pays aujourd’hui est un écho de son rêve : le pays des hommes intègres.

Sommes-nous prêts à reprendre le flambeau. Le choc brutal de l’annonce de sa mort est passé, l’Afrique attend. Qu’il ne soit pas mort pour rien, pas plus que Lumumba, Nyobe, Biko et les autres.

Nous appelons des dirigeants sur le modèle de Sankara.
Sa vie, son passage élèvent notre niveau d’exigence quant à nos dirigeants.
A BAS LA FRANCAFRIQUE ! VIVE L’AFRIQUE LIBRE DIGNE ET SOUVERAINE.

Nous sommes Sankara
Nous sommes des héros qui ne demandons qu’à nous lever. Mais nous l’ignorons souvent.
Nous sommes africains.
Nous sommes l’Afrique.
A nous de nous lever et aux héros tombés sur le champ d’honneur de reposer en paix.
 
Vous pouvez signer l'appel pour la réouverture de l'enquète sur l'assassinat de Thomas Sankara, déjà signé par : José Bové, Tiken Jah Fakoly, Eduardo Galeano, Didier Awadi, Jean Ziegler, Guy-Patrice Lumumba, Sams’K Le Jah, Eric Toussaint, Alain Lipietz, Michel Collon, Nicole Kiil-Nielsen, entre plus de 4000 signature...
 
 

Thomas Sankara : le Che africain meurt le 15 octobre 1987

Thomas Sankara, président du Burkina Faso, est assassiné le 15 octobre 1987, sept jours après son dernier discours public en hommage à Che Guevara. Il n'a jamais joui de la célébrité de son illustre modèle. A tort. Sankara reste le héros de nombreux Africains. Il est le Che africain.

Il persiste un mythe lancinant qui ne veut pas s'effacer : l'Afrique ne serait pas apte à porter des dirigeants responsables. Vraiment ? Aucun pays africain n'a connu la démocratie après la décolonisation. Sans exception, les leaders africains se sont avérés être des autocrates, des hommes corrompus ou des tyrans sanguinaires. Ils ne souhaitaient qu'une seule chose : être le plus riche possible, le plus vite possible. Voilà ce qu'est l'Afrique. Du moins, c'est ce que veulent faire croire les médias de masse des anciennes puissances coloniales.
Les vieux kleenex

Les exemples sont nombreux : Mobutu a fui le Zaïre (Congo) avec une fortune équivalente à la moitié de la dette du pays, le grotesque Bokassa en Centrafrique, l'horrible Idi Amin en Ouganda, Siad Barre en Somalie, Houphouët-Boigny en Côte d'Ivoire et Blaise Compaoré au Burkina Faso. Et j'en passe.
Ces hommes (il ne s'agit en effet que d' « hommes ») présentaient des similitudes : ils sont arrivés au pouvoir par la violence, forts d'un soutien total et illimité des forces militaires de leurs anciens colonisateurs, de larges fonds mis à disposition par le FMI et la Banque mondiale, la répression et l'exploitation de leur propre peuple. Et tous ont été largués par ces mêmes alliés comme des vieux kleenex une fois qu'ils arrêtèrent de servir les intérêts occidentaux.
L'un des criminels cités ci-dessus s'accroche toujours au pouvoir : Blaise Compaoré au Burkina Faso. Il a accédé au pouvoir par un coup d'Etat il y a 24 ans, le 15 octobre 1987. Ce jour-là, il tue son prédécesseur Thomas Sankara qui avait à peine 38 ans. Sankara était devenu président en 1983 de la Haute Volta après un coup d'Etat militaire contre un dictateur militaire. Ce coup d'Etat avait cependant profité d'un large soutien au sein de la population. L'on en comprendra très vite la raison.
 
 
Renault R5
Sankara est celui qui abandonne le nom colonial de Haute Volta et le remplace par Burkina Faso (littéralement : Pays des Hommes Droits = des gens justes). Il ne sera resté que quatre an au pouvoir mais ce furent quatre années incroyables pour le peuple du Burkina Faso. En à peine trois ans, il réussit à rendre le pays autosuffisant pour son alimentation. Le pays était jusqu'alors complètement tributaire de l'aide alimentaire pour combattre les famines qui s'abattait en permanence sur le pays.
Il était le premier dirigeant africain à nommer des femmes ministres (et pas pour les portefeuilles « Affaires féminines » ou « Planning familial »). Il fait interdire la polygamie et approuve des lois contre la violence conjugale. Il partage les terres abandonnées par les chefs tribaux féodaux entre les fermiers.
Il était aussi le premier leader africain à reconnaître le fléau du Sida ouvertement, à mettre en place un projet d'envergure visant l'amélioration des infrastructures publiques (routes, écoles, hôpitaux) et à refuser les prêts de capitaux étrangers. Il condamna ouvertement le FMI et la Banque mondiale d'être des instruments néocoloniaux (à raison).
La petite élite fortunée pro-française devait également y passer. Les salaires des hauts fonctionnaires furent drastiquement revus à la baisse. Il vendit la flotte complète de véhicules Mercedes des autorités publiques, diminua son propre salaire pour l'établir à 450 dollars par mois et roulait lui-même dans une petite Renault R5.
Il abolit cette habitude africaine de placarder partout des portraits du président. En outre, il mit un terme aux voyages en Business-class des hauts fonctionnaires et initia une campagne d'anti-corruption. Il n'hésita pas non plus à critiquer ouvertement ses homologues à travers l'Afrique.

Cela ne plut pas à Houphouët-Boigny, dictateur de la Côte d'Ivoire limitrophe. Il avait en effet été accusé par Sankara d'être un dictateur sanguinaire mais aussi d'avoir un intérêt économique direct à maintenir la pauvreté du pays voisin, le Burkina Faso. En effet, le commerce florissant du cacao en Côte d’Ivoire dépendait en grande partie de la main-d'oeuvre bradée des pauvres immigrants du Burkina Faso.
Grâce au soutien logistique de la France, Houphouët-Boigny put convaincre le successeur de Sankara, Blaise Compaoré, d'organiser un coup d'Etat. Aujourd'hui, Compaoré est encore et toujours le meilleur allié de la France en Afrique de l'Ouest. Il est d'ailleurs l'un des Africains les plus riches alors que le Burkina Faso est redevenu un des pays les plus pauvres d'Afrique, croulant sous une montagne de dettes envers le FMI et la Banque mondiale.
Sankara serait-il resté le leader prometteur qu'il fut durant quatre ans ? Nous ne le saurons jamais. Tout comme nous ne saurons jamais si Patrice Lumumba, premier ministre du Congo indépendant, aurait tenu ses promesses.
Une chose est néanmoins sûre : aucun de ces deux hommes n'ont eu l'occasion de le prouver. Une seule raison à cela : le riche Occident n'appréciait pas le programme soutenu par Sankara et consorts. Il ne servait pas les intérêts des anciens colons.
C'est un mythe d'affirmer qu'il n'existe pas de leadership africain responsable. C'est par contre une réalité d'affirmer que l'Occident a nui au leadership africain.

Sankara, Lumumba, Amilcar Cabral et beaucoup d'autres étaient de vrais dirigeants africains. Si nous, l'Europe, avions un jour envisagé de « développer » l'Afrique, ce sont ces leaders que nous aurions soutenu.

Lode Vanoost
Lode Vanoost a été député (1995-2003) et est depuis conseiller pour les institutions internationales des Balkans (Kosovo, Monténégro, Albanie, Macédoine et Serbie), du Caucase (Arménie), d'Asie (Timor oriental) et d'Afrique (Niger, Bénin, Congo-Kinshasa et Burundi).
 
 
 

47 ans après sa mort, le Che reste vivant

Peu de gens auront autant marqué l'histoire révolutionnaire et humaniste que Ernesto Guevara, Son courage, ses luttes, ses idéaux restent un exemple pour tous ceux qui continuent à lutter aujourd'hui pour un monde plus juste, définitivement débarrassé de la pauvreté, des injustices sociales, du racisme, de l’exploitation et de l'impérialisme, en bref du système de domination capitaliste.

De l’Argentine, son pays natal à la Grèce, en passant par la place Tahrir du Caire, son portrait est omniprésent pour symboliser les différentes manifestations contre l’austérité, le néolibéralisme, les dictatures... Il est de ces personnes qui ont marqué éternellement l’Histoire avec un grand « H ». Sa soif de justice et de liberté qui le conduira à la lutte armée à Cuba, au Congo et en Bolivie aura raison de lui. Il sera assassiné le 9 octobre 1967 par l’armée bolivienne et la CIA à la Higuera en Bolivie, alors qu’il tentait une énième insurrection révolutionnaire dans ce pays rongé par les injustices et la misère.
Mais, malgré les années de dictature fasciste et de politique néolibérale, sa mémoire reste vive et continue d’alimenter les luttes sociales qui ont porté au pouvoir des gouvernements progressistes et révolutionnaires en Amérique Latine.
Début 1950, après avoir lu et relu Don Quichotte, il part découvrir son continent avec son ami Alberto Granado à bord d’une simple moto. Ce voyage constituera pour lui un premier tournant décisif dans sa vie de révolutionnaire. En sillonnant les terres de ce qu’il appellera sa « véritable grande patrie », il découvre la violence sociale et la misère. Les multinationales états-uniennes tel que la United Fruit, surnommée la pieuvre verte, fleurissent et s’enrichissent pendant que l’immense majorité du peuple ne mange pas à sa faim. Face à cette réalité injuste et cruelle, il déclare en paraphrasant Simon Bolivar, El Libertador : « J’ai juré de ne pas prendre de repos tant que ne seront pas annihilés ces poulpes capitalistes »
Début 1952, il rentre à Buenos Aires pour terminer ses études : quinze examens réussis en trois mois et le voilà médecin. Mais, nomade infatigable et insatiable, il repart sur les routes sans savoir qu’il quitte son pays pour toujours.
L’Amérique Latine est alors en pleine effervescence et, en septembre 1952, il assiste en Bolivie à la Révolution Nationale qui nationalise les grandes mines et déclare la réforme agraire. En 1954, il est au Guatemala lorsque survient le coup d’État organisé et soutenu par la CIA et le gouvernement états-unien contre le président Jacobo Arbenz élu démocratiquement quatre ans plus tôt. Son tort ? Avoir osé s’attaquer aux intérêts économiques de la United Fruit en proposant une réforme agraire dans le but de redistribuer aux paysans pauvres les terres qui leur avaient été volées par l’oligarchie nationale et les multinationales. Cet événement tragique dans l’histoire de l’Amérique centrale constitua un deuxième tournant dans le destin de Che Guevara. Ce dernier est contraint de fuir et se rend à Mexico, alors la Mecque des exilés politiques latino américains. Il fait la rencontre de Raul Castro qui le présente immédiatement à son grand frère Fidel. Et lors d’une nuit de juillet 1955, après d’intenses discussions et échanges, il décide de s’engager aux côtés des révolutionnaires cubains qui tentent de débarrasser le pays du dictateur Fulgencio Batista. Pour le Che, cet engagement est une évidence : « Après ma longue marche à travers l’Amérique Latine, il n’en fallait pas beaucoup plus pour me persuader de rejoindre n’importe quelle révolution contre un tyran »
Durant cette lutte acharnée contre l’armée de Batista soutenue par les Etats-Unis, Guevara laissera sa trousse de médecin et prendra les armes. Il sera un artisan majeur de la victoire des « barbudos », notamment grâce à la prise de la ville de Santa Clara qu’il libère fin 1958. Fidel Castro l’élèvera même au rang de « Commandante » et il recevra la nationalité cubaine. Il sera nommé Président de la Banque Centrale puis Ministre de l’Industrie mais son combat révolutionnaire pour l’émancipation des peuples le poussera hors des frontières de Cuba. Au Congo, tout d’abord, où il combattra avec des insurgés qui tentent de mettre fin à la tyrannie de Joseph Désiré Mobutu arrivé au pouvoir en 1965 grâce au soutien des Etats-Unis et de l’ancienne puissance coloniale belge, après le coup d’Etat fomenté contre le Chavez congolais, Patrice Lumumba. Le Che sera durement marqué par ce coup de force des puissances occidentales qui a pour but d’empêcher la libération du Congo et de piller les immenses ressources minières du pays (or, argent, diamants.. ). Devant l’Assemblée Générale des Nations Unies, le Che déclare : « le cas douloureux du Congo, unique dans l’histoire du monde moderne, qui montre de quelle manière on se moque du droit des peuples dans la plus grande impunité. Les énormes richesses que détient le Congo et que les nations impérialistes veulent maintenir sous leur contrôle » Ce discours d’une grande clairvoyance serait tout à fait approprié au contexte actuel : guerre pour le pétrole en Irak, en Libye, au Venezuela, pour le gaz en Bolivie et pour les ressources minières en Afrique. L’Histoire continue et l’impérialisme avec elle. Au cours de son périple en Afrique, il rencontre le charismatique président égyptien Gamal Abdel Nasser ou encore l’Algérien Houari Boumediene. Lors de son célèbre discours d’Alger, il condamnera avec force l’impérialisme non seulement occidental mais aussi soviétique pour lequel il sera accusé de « dérive idéologique » par Moscou. Dans la lignée de la conférence de Bandung en 1955 et de la création du mouvement des non-alignés en 1961, Guevara a pour but de fédérer les peuples du tiers-monde qui luttent contre l’impérialisme, notamment états-unien, et pour leur indépendance. Il tentera tout au long de sa courte vie (il mourra à 39 ans) de créer un internationalisme prolétarien, du Vietnam de Ho Chi Minh au Chili de Salavador Allende en passant par l’Algérie de Boumediene. Car pour lui, latino américain de naissance mais combattant universel, les luttes n’ont pas de frontières. Vu que l’impérialisme et le colonialisme sont partout, les résistances doivent être partout. Sa mort le 9 octobre 1967 met fin a plus de quinze de lutte acharnée. L’humanité perd un de ses plus grands défenseurs. Les peuples en lutte rendent hommage à cet homme qui donna sa vie pour celle des autres. Le Che est mort, oui, mais seulement physiquement car ses idées émancipatrices, son esprit de révolte et de solidarité, sa haine de l’injustice continuent à planer au dessus des millions de personnes qui poursuivent leurs luttes vers la libération et la justice sociale.
Les révoltes populaires qui ont ébranlé l’Amérique Latine au cours de ces vingt dernières années, que ce soit celle du Caracazo vénézuelien le 27 février 1989 qui fit 3000 morts, que ce soit la violente protestation contre la privatisation de l’eau en 2000 en Bolivie ou encore les soulèvements qu’a connu l’Argentine en 2001 après que les recettes du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale (BM) aient envoyé 50% de la population sous le seuil de pauvreté, tout cela, ainsi que l’arrivée au pouvoir de présidents de gauche, montre que la figure du Che reste ancrée dans la tête de millions de latino américains.
En Amérique du Sud, les luttes d’hier sont les luttes d’aujourd’hui. Les révolutions démocratiques qui ont secoué le continent ont prouvé que les luttes populaires pour la justice et l’égalité finissaient toujours par l’emporter face aux défenseurs de la cupidité et de la loi du profit. Les nationalisations, les programmes sociaux, l’adoption d’une nouvelle constitution en Bolivie, au Venezuela et en Equateur ont redonné aux classes opprimées un rôle majeur dans la construction de nouvelles sociétés. De plus, les politiques d’intégration régionale comme l’ALBA ou internationale telle que l’ASA (Amérique du Sud-Afrique) vont dans le sens d’une mondialisation des luttes, d’une solidarité internationale entre peuples du Sud partageant un passé commun et sans aucun doute un avenir commun.
Alors, aux puissants de ce monde qui tentent de détruire les figures émancipatrices d’hier et d’aujourd’hui, à ceux qui tentent de décrédibiliser les grands libérateurs à coups de média-mensonges et de propagandes fallacieuses, à ces carriéristes politiciens qui hier, en mai 1968 portaient la figure du Che et qui aujourd’hui dénoncent sans relâche la « dictature chaviste », à ceux qui seraient tentés par la résignation étant donné qu ’il « n’y a pas d’alternative », les combats d’Ernesto Guevara, de Hugo Chavez, de Mohammad Mossadegh, Thomas Sankara, de Rafael Correa, d’Evo Morales...nous servent pour penser et imaginer un monde plus juste car aujourd’hui plus que jamais nous n’avons plus à rien perdre. Alors « Soyons réalistes, demandons l’impossible !! »
Source : Investig’Action

 

Evo Morales en route pour un troisième mandat

Les élections du 12 octobre prochain devraient voir sans surprise la réélection du président sortant, Evo Morales Ayma, avec une large avance sur son opposant principal, l'homme d'affaires Samuel Doria Medina, le Capriles bolivien, soutenu par l'élite conservatrice et les Etats-Unis. Pourtant, rien ne prédestinait ce cultivateur de coca à un tel destin...

Depuis 1998 et l’élection d’Hugo Chavez à la tête du Vénézuéla, l’Amérique Latine a entamé un cycle de révolutions démocratiques qui ont balayé les derniers vestiges mortifères du néolibéralisme.
Du Nicaragua à l’Argentine en passant par L’Equateur, des politiques économiques et sociales ambitieuses ont permis aux classes populaires de retrouver leur dignité.
Et parmi ces pays, la Bolivie fait office de nation pionnière en termes de réduction de la pauvreté, de lutte contre l’analphabétisme ou encore d’indépendance économique.
Les élections du 12 octobre prochain devraient voir sans surprise la réélection du président sortant, Evo Morales Ayma, avec une large avance sur son opposant principal, l’homme d’affaires Samuel Doria Medina, le Capriles bolivien, soutenu par l’élite conservatrice et les Etats-Unis.
Pourtant, rien ne prédestinait ce cultivateur de coca à un tel destin...
Le peuple bolivien, en grande majorité composé de Métis et d’Indiens, a vécu depuis son indépendance en 1825 sous la domination d’une élite blanche corrompue, héritière du colonialisme espagnol. Les Indiens ont été depuis la colonisation victimes de travail forcé, d’esclavage, d’oppression et de misère. Seule lumière au tableau, la Révolution Nationale de 1952 (1) qui a vu la nationalisation des grandes mines, le décret de la grande réforme agraire et l’approbation du vote universel.
C’est dans ce contexte historique de division ethnique et de racisme envers les peuples autochtones que des mouvements indigénistes, de paysans pauvres, de cocaleros et d’ouvriers virent le jour. Evo Morales, né en 1959, est un enfant de ces luttes pour la dignité du peuple bolivien. Syndicaliste et défenseur de la culture de la coca, il s’est opposé à l’ingérence de la DEA (Drug Enforcement Administration), l’organe états-unien censé "lutter contre le narcotrafic" en Amérique Latine mais qui en réalité a tenté à maintes reprises de déstabiliser des gouvernements qui ne plaisaient pas à la Maison Blanche (comme ce fut et c’est encore le cas au Venezuela où cette organisation terroriste travaille conjointement avec les paramilitaires d’extrême droite colombiens et l’ancien président Alvaro Uribe).
Après un long chemin de lutte où Morales échappa à une tentative d’assassinat orchestré par la DEA ainsi que son exclusion du Parlement ainsi que celle de son parti le Movimiento al Socialismo (MAS) en 2002, il remporte finalement l’élection présidentielle dès le premier tour le 18 décembre 2005 avec une large avance : 53,7% des voix. C’est la première fois qu’un mouvement remportait l’élection dès le premier tour sans avoir à constituer d’alliances au Parlement. L’élection de ce pauvre paysan cocalero ainsi que d’un ex-guerillero, le vice-président Alvaro Garcia Linera, sonne comme un coup de tonnerre dans la société bolivienne. Pour la première fois dans l’histoire du pays, un Indien arrive à la plus haute fonction de l’Etat. Morales symbolise désormais l’espoir pour des millions de Boliviens pauvres, meurtris par des années de néolibéralisme qui n’ont fait qu’aggraver la misère et répandu la faim et le désespoir. A l’arrivée au pouvoir de Morales, la situation est criante : la Bolivie est un des pays les plus pauvres du monde. En Amérique, seul Haïti connaît une pauvreté plus importante que la Bolivie. En ville, le pays est ravagé par le chômage et l’indigence tandis que, dans les campagnes, les gens souffrent de malnutrition. Mais fort de son passé de lutte syndicale et malgré l’opposition parfois violente de l’élite économique et des tentatives de déstabilisation de la part de l’impérialisme états-unien, Morales entame de profondes réformes afin de combattre les graves problèmes sociaux qui frappent durement le pays.
Juste après son élection, en 2006, il décide de redonner à l’Etat un rôle majeur dans la refonte de l’économie bolivienne, cette dernière étant basée essentiellement sur l’exploitation du gaz et du pétrole. Les multinationales étrangères s’enrichissent pendant que le peuple meurt de faim. Avant 2006, 82% des bénéfices liés au pétrole et au gaz allaient dans les poches des transnationales comme BP, SHELL ou encore TOTAL. L’Etat, lui, ne recevait que 18% de cette manne. La loi de 2006 sur les hydrocarbures inverse ces chiffres ; désormais 82% iront à l’Etat et 18% aux multinationales. Ces nationalisations courageuses, largement appuyées par la population à l’exception des classes supérieures et faisant fi de l’hostilité des multinationales qui voyaient leur pouvoir économique s’amoindrir, ont permis de lancer de vastes programmes sociaux avec l’aide des pays frères, membres de l’ALBA, dont la Bolivie fait partie comme le Venezuela ou encore Cuba(2). Ce dernier a notamment envoyé des milliers de médecins comme un peu partout sur la planète. Grâce à l’excellente compétence des médecins cubains reconnue dans le monde entier, des millions de personnes ont ainsi pu être soignées. La mission de santé "Milagro", présente notamment au Venezuela et qui a pour but de soigner les maladies des yeux, a bénéficié à plus de 600 000 Boliviens.
De plus, entre 2006 et 2014, la pauvrété extrême est passée de 38 à 18% (3). Enfin, en 2008, le pays est devenu la troisième nation latino-américaine après Cuba et le Venezuela à devenir "territoire libre d’analphabétisme".
Par ailleurs, grâce à une forte croissance économique (4), l’Etat bolivien a initié des projets de développement technologique (5)ambitieux : envoi d’un satellite afin d’accroître la connectivité et la réception d’internet, constructions d’éoliennes, lancement de la médecine nucléaire, maisons écologiques... Autant de projets qui ont pour but de consolider l’indépendance économique et énergétique de la Bolivie.
Sur le plan international et dans son intention de se libérer de la tutelle des Etats-Unis, la Bolivie, tout comme Cuba, le Nicaragua ou le Vénézuela, a développé et intensifié ses relations stratégiques et commerciales avec la Chine et ce, au grand dam de Washington qui voit d’un très mauvais oeil l’arrivée du géant chinois dans son "pré carré".
Nationalisations, programmes sociaux, réforme agraire, nouvelles coopérations internationales, autant de décisions qui ont fait hurler l’oligarchie nationale et les chancelleries occidentales. Pour les multinationales étrangères ainsi que pour le gouvernement états-unien, l’idée que la Bolivie sorte des pays soumis aux diktats de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International, refuse de libéraliser son économie, nationalise le gaz et le pétrole, se rapproche du diable Chavez, est suffisante pour tenter de déstabiliser le gouvernement démocratiquement élu.
En 2006, Philip Golberg (6), qui avait dirigé la mission états-unienne à Pristina au Kosovo, devient ambassadeur des Etats-Unis en Bolivie. Débutent alors des actions violentes dans les régions de Santa Cruz, Tarija, Beni et Pando où vit l’élite bolivienne. Cette dernière, tout en dénonçant l’étatisme, l’autoritarisme et l’indigénisme du président bolivien, organise des référendums illégaux pour réclamer l’autonomie de ces régions riches en hydrocarbures. Des bandes armées sèment le chaos et la terreur, prennent des aéroports ainsi que des édifices gouvernementaux. En septembre 2008, des paramilitaires assassinent sauvagement trente-et-un paysans dans le département de Pando. Ces événements rappellent étrangement les actions violentes qui avaient précédé les coups d’états au Chili en 1973, au Venezuela en 2002, au Honduras en 2009 ou encore en Equateur en 2010. L’objectif de ces violences orchestrées par les Etats-Unis avec la complicité des oppositions de droite et d’extrême droite nationales est de créer un climat de guerre civile, où la situation serait incontrôlable et justifierait donc une "guerre humanitaire" qui déboucherait ensuite sur un appui financier voire militaire "à ceux qui défendent la démocratie et les droits de l’homme"... Karl Marx avait affirmé : "Celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre" Ces tentatives de déstabilisation échouèrent et renforcèrent l’appui envers le président Morales. L’histoire ne se répéta pas.
De leur côté, les médias occidentaux lorsqu’ils évoquent (très rarement), le cas de la Bolivie, ne s’intéressent que très peu aux réussites socio-économiques du pays andin. Non, ils préfèrent se concentrer sur la posture "populiste" du président bolivien. Il est vrai que montrer les effets positifs sur la conjoncture économique de la reprise en main par l’Etat de l’économie, des nationalisations, de l’augmentation des dépenses publiques consacrées à l’éducation, à la santé et au logement serait un mauvais message envoyé par les élites économiques libérales aux millions d’Européens qui souffrent tous les jours un peu plus des politiques d’austérité et des privatisations à marche forcée.
Le gouvernement bolivien enmené par son président atypique a, depuis son élection en 2005, transformé en profondeur la société bolivienne. Les avancées en termes de réduction de la pauvreté, de gratuité totale des soins de santé, d’éradication de l’analphabétisme sont remarquables. Néanmoins, le chemin reste long car, de tous les pays victimes du colonialisme espagnol et du néocolonialisme états-unien, la Bolivie est sans doute un de ceux qui en a été le plus sévèrement affecté(7). La pauvreté y est toujours importante et les inégalités subsistent. Par ailleurs, les tentatives de déstabilisation du pays par les Etats-Unis restent fortes, notamment depuis que Morales a décidé de ne plus coopérer avec ce simulacre de "guerre contre le narcotrafic" qui a permis aux Etats-Unis d’intervenir de nouveau en Amérique du Sud.
Avant d’être exécuté en 1781, Tupac Katari, qui avait mené une insurrection indienne contre le colon espagnol, lanca à ces derniers : "Un jour je reviendrai et nous serons des millions". Il semble aujourd’hui que Tupac Katari soit revenu et que son ombre plane au-dessus des millions de Boliviens qui ont repris leur destin en main et ont lancé leur seconde et définitive indépendance !

Moctar le panafricain

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